Notre-Dame brûle… les mauvais samaritains à la rescousse !

Avec l’incendie de Notre-Dame de Paris, ce sont des centaines d’années d’histoire qui sont parties en fumée. Que l’on soit ou non attaché à cette histoire, que l’on soit religieux ou laïc, il est normal de se sentir touché par cet incendie.

Mais si cet événement a pu permettre au moins une chose, c’est de mettre à nu de nombreux problèmes prédominants dans notre société et – bien qu’il puisse apparaître comme étant exceptionnel – ce type d’événement est en réalité bien trop courant.

Un drame évitable

L’incendie qui s’est déclenché le 15 avril 2019, peu après 18h, à la cathédrale de Notre-Dame de Paris, aurait probablement pu être évité. En effet, tout porte à croire que l’incendie s’est déclenché à la base de la flèche, là où se déroulaient les travaux.Or ces travaux, débutés en juillet 2018, manquaient cruellement de fonds : alors que le coût total des rénovations prévues était estimé à 100 voire 150 millions d’euros, l’État avait prévu de débloquer entre 2 et 2,5 millions d’euros par an. Pour pallier ce manque, des collectes de dons étaient organisées, qui apporteraient environ 5 millions d’euros par an.

C’est donc avec un manque évident de fonds qu’ont commencé les travaux de rénovation de la cathédrale de Notre-Dame de Paris. Moins d’un an plus tard, ces travaux se terminent par un incendie, dont la cause la plus probable est un accident survenu là où se déroulaient les travaux. Or, si les moyens suffisants étaient présents pour effectuer ces travaux, si les moyens étaient là pour que toutes les précautions puissent être prises, il est beaucoup, beaucoup moins probable qu’un accident, qui plus est d’une telle ampleur, se soit déroulé.

Les Mauvais Samaritains à la rescousse

Maintenant que cet accident est survenu et qu’une partie du monument a été ravagé, l’argent semble tomber du ciel comme l’eau lors d’une tempête. Toutes les grandes fortunes semblent en effet prêtes à faire leur bonne action pour reconstruire Notre-Dame de Paris : citons par exemple les 200 millions de la part de Bernard Arnault, les 200 millions de la part de Françoise Bettencourt Meyers, ou encore les 100 millions de la part de la famille Pinault.

Ce sont ainsi 500 millions d’euros qui viennent, presque comme par magie, d’être dédiés aux reconstructions, soit plus du triple de ce qui était nécessaire pour effectuer correctement les rénovations initiales. Et pourtant, lorsqu’il s’agissait justement de faire ces rénovations, l’argent semblait inexistant. C’est seulement maintenant que ce monument est ravagé que ces “mécènes” arrivent, comme des superhéros la cape au vent, afin de sauver ce qui reste et de reconstruire ce qui n’est plus.

Doit-on les remercier pour leur générosité ?

Alors que l’ « argent manque », la fortune des Arnault, Pinault et Bettencourt réunis s’élève à 136,4 milliards d’euros. Non seulement cela, mais cet argent, dont ils donnent les miettes quand ça les arrange, ce n’est pas eux qui l’ont produit. Ce sont tous leurs salariés qui, par leur travail, ont produit tous ces milliards qu’ils ont accaparés. Lorsqu’ils donnent ces millions, ils ne donnent finalement qu’une partie de ce qui était à nous tous et qu’ils ont fait leur. Derrière la générosité du privé ne se trouve en réalité qu’une infime partie de notre dû masqué en cadeau.

Aussi, notons que, puisqu’ils s’élèvent à 500 millions au total et leur fortune à 136,4 milliards, ces dons représentent environ 0,0037 % de cette fortune. Cela équivaut, pour une personne seule dont le compte en banque contient 3 000 euros, à donner environ 11 euros. Autant dire que, non seulement cet argent n’est au départ pas le leur, mais en plus leur générosité est finalement assez limitée.

Et alors même que ce n’est même pas leur argent qu’ils donnent, déjà un appel aux dons a été lancé prenant la prétendue générosité de ces personnes comme exemple pour que tous y aille de son propre don. Mais la mission de récupérer des fonds pour reconstruire Notre-Dame de Paris incombe-t-elle aux travailleurs qui voient déjà une partie de leur propre argent partir directement dans la poche de leurs patrons, et qui peinent à finir leurs mois ?

Et même s’ils donnent, ce sont toujours ces Arnault, Pinault, Bettencourt, et tous les autres, qui feront le tour de la presse ; ce sont eux qui vont se voir attribué le titre de bienfaiteurs et de sauveurs du patrimoine. Mais qui sera là pour féliciter et remercier personnellement le jeune travailleur qui, touché par cet événement, décide de donner une vingtaine d’euros, alors que cela représente beaucoup plus pour lui que 200 millions représentent pour Arnault ?

Au-delà de cette dimension financière douteuse, nous pouvons observer une tentative nauséabonde d’Union Sacrée : les gangsters de la grande bourgeoisie et Macron, main dans la main avec les travailleurs, « tous ensemble » (cf. Macron) pour reconstruire Notre-Dame « encore plus belle » (idem, sic!). Une aubaine pour eux dans un contexte social tendu des Gilets Jaunes. Les travailleurs et les jeunes ne doivent pas tomber dans ce piège, ne laissons pas nos ennemis de classe récupérer pour leur compte un événement dramatique.. dont ils sont à la source, en définitive !

Un événement bien trop commun

Les événements comme celui de l’incendie de Notre-Dame de Paris semblent bien rares. Pourtant ceux-ci sont plus communs qu’il n’y paraît.

En effet, au Yémen par exemple, la vieille ville de Sana’a est en proie à de nombreux bombardements de la part des puissances occidentales alliées à l’Arabie saoudite, dont la France. Or, la vieille ville de Sana’a est classée à l’UNESCO depuis 1986 et certains de ses bâtiments sont vieux de plus d’un millier d’années. Pourtant, les bombardements, qui n’ont toujours pas terminé, ont déjà détruit complètement une partie de ce site historique. Ce sont ainsi des centaines d’années d’histoire qui sont totalement détruits et perdus à jamais, uniquement dans l’intérêt impérialiste de l’Arabie saoudite et de ses alliés occidentaux. De plus, rappelons au passage qu’en 2017, le budget militaire de la France représentait 32,7 milliards d’euros, alors même que l’argent semble introuvable.

En Syrie également de nombreux monuments ont été partiellement ou totalement détruits. Citons par exemple l’arc de Palmyre et le temple de Baal, tous deux millénaires, tous deux complètement détruits par l’État islamique, dont l’existence est une conséquence directe de l’ingérence impérialiste au Moyen-Orient.

Ainsi, même lorsqu’il s’agit de monuments historiques, le système capitaliste semble incapable de fonctionner correctement. Le manque de fonds pour les travaux de Notre-Dame de Paris et son incendie démontrent à quel point le capitalisme n’accorde finalement que peu d’importance au patrimoine. À titre d’exemple, en 2018 le budget accordé à l’entretien et à la restauration du patrimoine était de 326 millions d’euros. Comment entretenir et restaurer correctement un patrimoine aussi riche que celui de la France avec aussi peu de moyens ?

Mais pour le système capitaliste, les monuments historiques, comme tout ce qui lui est soumis, ne sont qu’une marchandise et ne sont considérés qu’en fonction des profits qu’ils peuvent rapporter. Bien que Notre-Dame de Paris soit le monument le plus visité d’Europe et donc un lieu touristique à fort potentiel de revenus, la cathédrale tenait encore debout et attirait toujours autant de personnes. Mais maintenant que, par sa destruction partielle, l’attractivité touristique de Paris et les profits à en tirer viennent de diminuer considérablement, l’argent est tout trouvé pour la restaurer.

Ainsi, que ce soit par leur marchandisation, par la mauvaise utilisation de l’argent public, par le vol et la stagnation de centaines de milliards d’euros dans les mains du privé et par les guerres que le système capitaliste provoque, aucun monument historique, véritables témoins de l’histoire de l’humanité, n’est à l’abri d’être endommagé, délabré, voire détruit, par ce système obsolète. Organisons-nous pour lutter contre ce système capitaliste, pour le socialisme où la culture aura une place plus importante !