Game of Thrones : « le trône du fric » (no spoil)

Qu’on s’attendait ou non au personnage victorieux de la série, le grand vainqueur se tient derrière les écrans. « Une fin douce et amère » nous annonçait la production. Quand on pense aux milliards de chiffre d’affaire de HBO (6 milliards de chiffre d’affaire annuel) et aux dépenses colossales pour chaque épisode de la dernière saison de Game of Thrones (15 millions en moyenne pour chaque épisode – le plus gros budget de l’histoire des séries), on peut se permettre une telle pirouette dans le titre de l’article.

En dehors du caractère réactionnaire du contenu interne de la série (souvent propre au style heroic fantasy) et du caractère expéditif de la dernière saison – au grand dam des téléspectateurs et des plus grands fans de la série – il est intéressant d’observer la machine marchande mise en place depuis plusieurs années déjà. Car oui, Game of Thrones, ce n’est pas un simple produit culturel : c’est une machine économique avec un système de sous-industries. Baskets, guitares, bières, tasses, etc., c’est toute une série de marchandises qui est confectionnée autour de la série. À tel point que cette dernière – en tant que produit culturel de masse marchand – vient s’insérer dans nos rapports sociaux : certains mariages sont organisés sur le thème de Game of Thrones et la référence est envahissante dans la vie de tous les jours (discussions, cours, etc.).

Désormais référence médiatique, culturelle et marchande, Game of Thrones a su combler un vide dans les productions télévisées / cinématographiques dans le style heroic fantasy, depuis le Seigneur des Anneaux de Peter Jackson. C’est par une habile stratégie de marché que HBO concurrence son adversaire Netflix, le mastodonte de vidéo à la demande… et quand bien même difficilement puisque ce dernier reste leader. L’arrivée d’Amazon en la matière avec le Seigneur des Anneaux, risque aussi d’accroître les rivalités.

Et qui dit rivalités, dit adaptation au marché. En effet, si des « contenus originaux » sont produits, c’est pour répondre aux goûts et attentes des téléspectateurs, souvent en fonction des pays. Ce qui explique par exemple les séries espagnoles, danoises, etc., mobilisant ainsi un ensemble de sous-industries pour le business des entreprises. De plus, les catalogues gagnent en quantité (et souvent pas en qualité), de sorte qu’on passe plus de temps à y naviguer qu’à regarder quelque chose ! Et si le catalogue devient un loisir en soi, ces monopoles de l’industrie audiovisuelle que sont HBO et Netflix mettent en place des systèmes de détection des visionnages pour proposer « du contenu fait pour vous ». De nouvelles propositions à consommer sont faites, en parallèle du changement de vignettes de films / séries en fonction des goûts, etc. Où commence la surveillance et la collecte des données ?

De par tous ces éléments, le capitalisme se renforce sur le dos des loisirs et du divertissement des jeunes et des travailleurs. Cette tendance du capitalisme à vouloir tout monopoliser pour faire du profit est tangible à travers l’exemple de Game of Thrones. Cette emprise croissante peut être observée dans l’exemple le refus au créateur de l’univers de la série de diffuser l’épisode final dans son cinéma pour les fans, ou encore dans les œuvres commandées auprès des fan artists pour en tirer un profit supplémentaire.

Cinq saisons du préquel de Game of Thrones sont annoncées : quand la machine est lancée, pourquoi s’arrêter maintenant ?

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Sources :

https://next.liberation.fr/images/2019/04/12/la-chaine-hbo-reprise-par-des-mains-de-fer_1721078

https://www.lopinion.fr/edition/wsj/game-of-thrones-comment-hbo-tire-profit-oeuvres-d-art-fans-186033

https://www.lepoint.fr/series-tv/game-of-thrones-les-7-chiffres-d-un-business-en-or-massif-14-04-2019-2307563_2115.php