Alors que les médias jouent la carte de terreur sociale, autour de cette fameuse « montée de la violence » chez les jeunes de nos quartiers ouvriers, le gouvernement ne trouve pas d’autres solutions que de proposer la présence de policiers dans ou devant les établissements scolaires. Et ceci en priorité dans les établissements dits « sensibles ».
Quelle violence pour la bourgeoisie et son gouvernement ?
Tout le battage médiatique actuel insiste sur cette prétendue violence montante, comme surgissant de nulle part. La violence décriée par les couches de la bourgeoisie les plus réactionnaires apparaît comme une violence sans explication, provoquée par la nature elle même des « banlieues » ou des zones dites « sensibles », ce qui revient directement à la soi disant nature de leur population. Violence sans explication autre que la « nature » qui se refléterait également dans les établissements scolaires désignés ZEP. Les élèves seraient selon la version bourgeoise extrêmement violents à cause d’eux mêmes, par caprice.
Un énorme dispositif médiatique est dédié à la construction de cette conception des quartiers populaires et de leur population, spécialement de sa jeunesse. Des événements ponctuels sont ainsi hyper-médiatisés, comme dans les cas des armes braquées sur des enseignants pour construire une idéologie exécrable sur la violence et la brutalité de la population des quartiers populaires. Mais cela reste des événements ponctuels si on prend en compte l’énorme masse des collégiens (366.700 en 2013) et lycéens (15.500 en 2013) qui sont scolarisés dans des établissements prioritaires. Parmi ces établissements il y a des épisodes de violence, oui. Mais premièrement, pas forcément plus que dans d’autres zones, et deuxièmement, l’incidence de ces épisodes est exagérée dans le but idéologique de stigmatiser ces établissements et les quartiers où ils sont implantés. De la même façon que les médias et les politiciens bourgeois répètent ad nauseam que les quartiers où ces établissements se trouvent sont pris par la violence du traffic de drogues.
La population ciblée n’est pas choisie au hasard, mais répond à la logique de la lutte de classes : c’est la bourgeoisie qui accuse des masses ouvrières de violentes et brutes par nature. La stigmatisation de centaines de milliards d’ouvriers, qu’on peut distinguer en outre par leur couleur de peau (étant ces populations issues en bonne partie des migrations du 20ème et 21ème siècle) – ou par leurs habitudes, par leur façon de parler, de s’habiller, de se comporter, par leurs études ou leur profession – est lancée. Ce qui répond à une logique claire qui suit l’exploitation capitaliste de la main d’oeuvre de la classe ouvrière. Ces population stigmatisées, leur seul stigmate suffirait à justifier leur cantonnement aux boulots les plus précaires et aux plus bas niveaux d’études, voire à leur exclusion de la production capitaliste – c’est-à-dire, leur sentence à subir le chômage ou le travail au noir -. Cette logique ouvre la voie aux discours fascistes, qui culpabilisent les secteurs les plus précaires de la classe ouvrière d’exactions – chômage, pauvreté, « pertes » pour les petites entreprises, impôts élevés, bref, tout ce que les couches les plus réactionnaires de la bourgeoisie inventeront ! – dont seul le capitalisme est coupable. En France nous connaissons déjà ces mensonges : tous les gouvernements bourgeois les ont utilisés comme support idéologique de la marginalisation des masses ouvrières des quartiers populaires et leur confinement aux conditions de travail les plus précaires, confinement qui ne bénéficie qu’au capital, qui tire des profits des salaires bas, des contrats précaires et du chômage endémique du capitalisme actuel.
Quelle violence est pratiquée en réalité ?
La question n’est pas de nier la violence dans les quartiers populaires, mais d’arriver à une analyse correcte de sa nature. Et pour cela la mesure du gouvernement pose les bases de cette analyse : c’est l’État bourgeois, larbin du capital, le premier coupable de cette violence. Les populations les plus précaires, avec le plus haut taux de chômage ont été entassées dans ces quartiers avec la complicité des politiques d’urbanisme, du grand capital commercial qui s’est implanté massivement dans des aires anciennement résidentielles et des monopoles immobiliers. La violence de l’État a joué un rôle essentiel de répression policière et bureaucratique pour pousser la population ouvrière vers des zones spécifiques qu’on appelle aujourd’hui « banlieues » ou « zones sensibles » et qui sont juste, pour beaucoup, nos foyers. Où, à cause de la misère que la condition de la population de main d’oeuvre non diplômée et stigmatisée leur infligeait, des formes d’économie capitaliste non légale se sont développés en profitant de la détresse de ses habitants.
Le trafic existe, oui, et il n’est pas question de le nier. Pas non plus d’exagérer son impact sur les quartiers populaires comme la bourgeoisie fait en associant tout ce qui touche les banlieues à la violence et les drogues. En dehors de sa condition illégale le trafic n’est rien d’autre qu’une affaire capitaliste non concerné par la législation sur le travail qui profite de la détresse de la main d’oeuvre des quartiers ouvriers pour se développer, enrichissant les capitalistes propriétaires et condamnant les travailleurs (que la bourgeoisie prend un malin plaisir à appeler dealers) à des conditions de travail aberrantes et dangereuses. Les travailleurs et travailleuses du trafic sont toujours minoritaires. Mais quelque chose les relie à une bonne partie du reste des habitants de nos quartiers ouvriers : la précarité galopante et une incidence monstrueuse du chômage et la pauvreté dont la responsabilité tombe uniquement sur le capital dans sa phase impérialiste. Celui-ci, avide de profits, nécessite s’assurer une main d’oeuvre pauvre pour baisser les salaires et précariser les conditions de travail.
La réponse des gouvernements bourgeois à ces faits, dont la classe ouvrière rappelons-le a été victime et non coupable, a été de réaliser une violence et une marginalisation accrues au plus grand profit du capital. La preuve, face à deux cas de violence isolés mais hyper-médiatisés, le gouvernement bourgeois propose de poster des policiers dans tous les établissements scolaires « sensibles » ! Et cette mesure militarisant encore plus les quartiers ouvriers est vue par certains comme une mesure de bon sens, allant de soi, tellement le mensonge de la nature violente de nos quartiers a eu une incidence sur la population. La violence est pratiquée par le capital et son gouvernement.
Les épisodes de violence associés au trafic capitaliste sont, autant que l’état d’exception permanent infligé par les forces répressives du gouvernement bourgeois, un fléau pour la population des quartiers ouvriers. D’abord pour la précarité dont il profite et qu’il accroît en tant qu’affaire capitaliste et deuxièmement pour la violence qu’il y instaure et que subit toute la population. La violence policière, elle, perpétue et intensifie la stigmatisation et le cantonnement des populations dans leur situation de couche la plus précarisée de la classe ouvrière. Les CRS portant des armes à feu à la porte des établissements scolaires, les contrôles au faciès, les couvre-feux non avoués, les conflits permanents que la police provoque avec la jeunesse ouvrière et maintenant, si la proposition devient réalité, des agents de police en permanence dans les établissements. La militarisation des quartiers est intense, le capital est le seul coupable de la violence, tant dans son versant illégal que -et surtout- dans son versant d’État. La bourgeoisie, comme à son habitude, a inversé la réalité : la classe ouvrière est culpabilisée des méfaits, des abus et des oppressions dont seul le capital et les capitalistes sont coupables.
La répression de classe est l’essence de la dictature de la bourgeoisie
Jamais il ne sera expliqué quelles seront les causes matérielles et sociales de ces faits sociétaux. Cela fait des années que les dites « zones sensibles » sont délaissées, marginalisées par la société bourgeoise, et rien n’a été réellement fait pour améliorer les conditions de vie des jeunes, particulièrement celles et ceux issus des milieux populaires et prolétaires. Il n’empêche : la propagande médiatique bourgeoise s’insère dans un contexte de tensions sociales. Le message sous-jacent est clair. Si ce dernier repose sur la dénonciation absolue de toute violence, alors que dans le même temps la bourgeoisie fait usage d’une violence plus importante et quotidienne (pressions au travail, chantage au chômage, licenciements, etc.), la propagande semble nous dire : « vous avez le choix entre le camp du désordre, celui des racailles et des manifestants, et le camp de l’ordre, celui des patrons, du travail salarié, même si votre salaire est bas ». Ainsi, la violence dans les quartiers populaires est caricaturée, et les solutions proposées par le gouvernement sont purement répressives ou « palliatives » dans le meilleur des cas.
La présence policière dans les établissements scolaires ne répond qu’à une logique de militarisation de la société dès le plus jeune âge, avec une violence étatique permanente. La présence d’un policier armé ne sera qu’une forme de couvre-feu permanent, avec surveillance des jeunes en prime, notamment s’ils ont des activités syndicales lycéennes : une pierre deux coups ! Cette mesure proposée n’est qu’une des multiples mesures réactionnaires et anti-populaires que la bourgeoisie met en place pour asseoir sa domination, renforcer sa dictature de classe sur l’ensemble de la société.
La bourgeoisie, à la tête du reste de classes sous sa dictature, ne peut offrir aucune solution à la violence de nos quartiers, au contraire elle est, à travers le gouvernement, sa cause première. La classe ouvrière et les secteurs populaires, habitant des « zones sensibles » ou pas, ne peuvent laisser leurs conditions de vie et de travail dans les mains de tels criminels prêts à tout pour augmenter les profits du capital. La solution passe par la classe ouvrière, par son organisation en tant que classe vers la destruction de la dictature des capitalistes. Ne laissons pas la dictature de la bourgeoisie nous pourrir la vie !